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Le couteau et la loi

1er juin 2015, 12:59, Ecrit par Jacques

Salut,

Je vois vraiment aucunement sur quelle base tu as pu être jugé ainsi. Un cran d’arrêt ou assimilé ne fait pas d’un couteau un poignard. Un couteau-poignard, c’est au grand minimum une pointe aiguisée des deux côtés, ce qui est à peu près inexistant sur les couteaux suisses, multitools, laguioles, et Opinel...

Et si tu regardes la définition des douanes pour l’importation d’armes blanches, il est très clair que la loi a pour intention de se focaliser sur les poignards proprement dits. Il est question de lame solidaire, de 15cm, aiguisée des deux côtés, de 4mm d’épaisseur, et avec une garde... C’est à dire quelque chose qui est très clairement une arme par nature.

Les couteaux suisses, multitools, laguiles, et Opinel, ne sont aucunement des armes au regard de la loi. Et c’est évidemment des plus logique.

La question des armes par destination n’est aucunement spécifique aux couteaux (n’importe quoi peut faire office d’arme par destination, même un slip ou un rouleau de PQ), et concerne un usage précis (même en tant que menace, voire en tant qu’intention, si elle est prouvable, et ça concerne bien entendu autant l’attaque que la défense).

Reste la question de la sécurité publique. On peut facilement arguer que même un couteau suisse, multitool, laguiole, ou Opinel, dans une école, dans un tribunal, dans un avion, dans un stade, ou pendant une manifestation, ou autre truc similaire, ça peut éventuellement être assimilé à un risque public. Mais sans élément personnel précis, ça reste une extension de la loi, donc les conséquences sont censées être en fonction (i.e., simplement laisser à l’entrée si on veut pas le laisser chez soi ou dans la voiture, ou confiscation jusqu’à sortie).

Le fait qu’un policier te confisque, voire qu’un juge te condamne à quoi que ce soit, uniquement pour le port/transport d’un couteau suisse, multitool, laguiole, ou Opinel, même à cran d’arrêt ou assimilé, que tu portes/transportes à titre utilitaire au quotidien (pour manger, pour bricoler, pour intervention utilitaire en cas d’accident, etc., pas pour « te défendre face à une personne »), n’en fait pas une décision légitime, et encore moins une loi, surtout en France qui interdit les "arrêts de règlement". C’est simplement une décision abusive, arbitraire, en pleine connaissance, la loi étant au final assez claire dans son imprécision (dans la nouvelle loi de 2013 encore, ne sont cités dans la loi elle-même, que les poignards et couteaux-poignards, et non pas les simples couteaux... évidemment que le juge n’a aucune légitimité à généraliser à tout et n’importe quoi ensuite, en ignorant entièrement tous les détails du texte...).

On peut facilement aussi rappeler l’article V de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen : « La Loi n’a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n’est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas ». Il est impossible d’arguer, surtout de bonne foi, que porter un couteau suisse, un multitool, un laguiole, ou un Opinel, dans des conditions « normales », puisse être considéré d’une quelconque manière, comme nuisible à la société. Et l’inverse est tout à fait évident, étant donné la grande utilité de ces outils au quotidien. Un texte qui contredirait ça ne peut ainsi pas être considéré comme une loi.

Alors évidemment ça va pas empêcher le policier qui fait du zèle et/ou plein de préjugés basiques sur la loi, ou un peu parano (certes pas forcément anormal dans certains cas), de te confisquer ton couteau, et évidemment qu’étant donné le peu de cas qui est fait de la liberté actuellement, t’as zéro intérêt à refuser cette confiscation dans l’immédiat, surtout évidemment par la force. Et si t’es trop épuisé pour contester, tu peux même leur laisser et t’arrêter là, et ne plus jamais sortir avec un couteau, en dehors des quelques cas particuliers davantage explicités type agent de sécurité, club précis, pêche, chasse, randonnée à la campagne, etc. Mais ça ne veut aucunement dire que ce policier a la moindre légitimité légale à te confisquer ton couteau, et encore moins à t’imposer une amende, et se plaindre à un juge qui te rajouterait de la prison. Et dire que ce serait la loi sur Internet, comme on le voit très souvent, est très nocif, en propageant des préjugés (qui peuvent en plus tout à fait influencer au moins les policiers).

Encore une fois, je parle ici aucunement de chercher même à cautionner l’idée de pouvoir utiliser un couteau suisse, multitool, laguiole, ou Opinel, en tant qu’arme de défense. Si même rien que l’intention est prouvée, ça pourrait être considéré comme illégal, en tant qu’arme par destination. (Ça peut certes être assez frustrant, quand on pense à un attaquant plus fort physiquement, davantage expérimenté, ou armé, mais on peut certes y avoir une certaine logique globale de limitation des armes, et c’est de toutes façons pas une arme qui va te garantir quoi que ce soi, et le résultat peut facilement être bien pire... -cela étant dit, ça veut pas dire que t’as pas techniquement le droit ensuite d’utiliser ton couteau en tant qu’arme par destination, sur le coup, en tant que légitime défense, si tu le ’veux’ vraiment, comme tu peux utiliser n’importe quel objet pour te défendre, mais faut faire attention autant que possible ensuite à la « proportionnalité », qui restreint la légitime défense, sachant cependant que proportionnalité ne veut aucunement forcément dire égalité, surtout en situation de stress intense, de manque d’expérience, ou de réalité ou sentiment un minimum justifié de grand risque (reste à ce que le juge le reconnaisse, mais encore une fois, il aura pas forcément raison dans sa décision... c’est même prévu légalement, avec les procédures de contestation/appel...)).

Je dis simplement qu’il est tout à fait légitime, légalement, de porter et transporter un couteau suisse, multitool, laguiole, ou Opinel, même à cran d’arrêt, au quotidien, à titre utilitaire, sauf éventuellement dans certains lieux ou certaines situations particulièrement « sensibles » (et encore, dans ces cas, sans élément personnel précis, on peut pas justifier autre chose que la confiscation temporaire jusqu’à ce qu’on quitte les lieux, surtout s’il s’agit en plus que d’un transport -outil « non utilisable immédiatement », genre couteau pliant rangé au fond d’un sac dans une pochette-, à moins éventuellement qu’il ait été demandé explicitement de laisser ces outils à l’entrée avant).

Bye.

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