Sais-tu, frère, ce qu’est la pureté du cœur ?

Ils reprirent tous deux leur marche. Après un long moment, François demanda à Léon :

- Sais-tu, frère, ce qu’est la pureté du coeur ?
- C’est ne pas avoir de faute à se reprocher, répondit Léon sans hésiter.
- Alors, je comprends ta tristesse, dit François. Car on a toujours
quelque chose à te reprocher.
- Oui, dit Léon, et cela précisément me fait désespérer d’arriver un jour
à la pureté du coeur.

- Ah, frère Léon, crois-moi, répartit François, ne te préoccupe pas tant de la pureté de ton âme. Tourne ton regard vers Dieu. Admire-le. Réjouis-toi de ce qu’il est, lui, toute sainteté. Rends-lui grâce à cause de lui-même. C’est cela même, petit frère, avoir le coeur pur.
Et quand tu es ainsi tourné vers Dieu, ne fais surtout aucun retour sur toi-même. Ne te demande pas où tu en es avec Dieu. La tristesse de ne pas être parfait et de se découvrir pécheur est encore un sentiment trop humain. Il faut élever son regard plus haut, beaucoup plus haut. Il y a Dieu, l’immensité de Dieu et son inaltérable splendeur. Le coeur pur est celui qui ne cesse d’adorer le Seigneur vivant et vrai. Il prend un intérêt profond à la vie même de Dieu et il est capable, au milieu de toutes les misères, de vibrer à l’éternelle innocence et à l’éternelle joie de Dieu. Un tel coeur est à la fois dépouillé et comblé. Il lui suffit que DIeu soit Dieu. En cela même, il trouve sa paix, tout son plaisir. Et Dieu lui-même est alors toute sa sainteté.

Eloi Leclerc, Sagesse d’un pauvre

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