Foulards verts en 1961

Le carnet du CP des patrouilles libres Éclaireurs de France

Un grand merci à Françoise qui nous a transmis ce document.

Laisse-toi conter les patrouilles libres au fil des pages, et découvre les explications qui te permettront de tout comprendre !

Le livre à feuilleter

En guise d’introduction

Jusque vers les années 67-68, il y avait des Patrouilles libres dans le SF?. On appelle ainsi 5 à 8 personnes qui choisissent de vivre le scoutisme alors qu’il n’y a pas de groupe local. Selon l’association ce groupe se distinguait par un foulard de couleur unie noir ou vert – ou une cravate verte (guides et éclaireuses FFE).

Il serait intéressant de mettre en parallèle « Foulards verts » avec « Foulards noirs » (SDF) et « L’équipe libre » (GDF). Chez les EUF, à ma connaissance, les patrouilles et autres éclaireurs isolés étaient seulement mentionnés dans le « Sur les traces », manuel de l’Éclaireur?, et ces isolés étaient constitués en « Réseau Bayard » [1]. Chez les éclaireuses FFE, le réseau des Clans libres était rattaché au national pour les camps.

Pour m’informer et me former sur ma fonction de futur CP des Goélands dans ma Troupe EDF, j’ai acheté ce livre alors que j’étais en vacances, à « La Hutte » de Nice, le 18 août 1962. J’avais alors 14 ans.

Le livre était une édition d’avril 1961 (l’année dite « du cinquantenaire » des Éclaireurs de France). Il concerne la branche verte (12-16 ans) c’est-à-dire les filles ou les garçons (chez les EDF les Louveteaux? et les Routiers? étaient ensemble dans les unités, alors que la branche moyenne séparait les genres. Par ailleurs les filles de l’association (toutes branches) n’étaient pas reconnues par le scoutisme Français puisqu’il y avait par ailleurs une section « neutre » dans la Fédération Française des Éclaireuses. Il n’y avait pas de trèfle dans l’insigne. L’uniforme des filles était calqué sur celui des garçons : chemise beige (vers 1963 : chemise beige rosé) et le reste : bleu marine.

Le contexte de l’époque

Le contexte EDF est important à comprendre.

En 1961, les EDF ont atteint une sorte de sommet dans leur développement. Lorsque le livre paraît, le Cinquantenaire se prépare. Il aura lieu à Clermont-Ferrand et rassemblera près de 8 000 participants : défilé, grand jeu, veillée… Sur la lancée le mouvement espère une ascension durable et compte le « système des PL « dans sa stratégie de développement ».

Quelles sont les chances des EDF dans cette perspective ?

Elles sont loin d’être négligeables.

Beaucoup d’animateurs, de responsables de Groupe ou de Troupe, de commissaires de Province (c’est toute une hiérarchie qui ossature nos Mouvements dans les années 50-70 !) travaillent dans le monde de l’Éducation nationale. Le Mouvement EDF, d’ailleurs, tout comme les ENF?, a été agréé par le ministère. Dans beaucoup d’écoles rurales, les méthodes Freinet sont en usage (mouvement d’éducation nouvelle où l’on favorise l’autonomie, l’implication, la participation des élèves : études sur le terrain, enquêtes, activités manuelles, artistiques ou sportives, imprimerie scolaire, encouragements à l’expression écrite par « le texte libre », correspondance scolaire, etc.)

Il y a donc un maillage parallèle, semblable à celui des Paroisses, qui peut soutenir les efforts et la logistique.

Le livre présente peu l’association (juste verso 1ère de couverture : les statuts, article 1 précisant laïcité, ouverture filles-garçons et indépendance). Il s’adresse aux jeunes et il est fait pour jeter les bases d’une mise en pratique du scoutisme par sa cellule de base : la Patrouille.

Mais il précise (page 81) que si ladite Patrouille ne peut fournir de garant autorisant son existence (personnalité locale) elle ne pourra être cautionnée ou reconnue par le Mouvement.

On mentionne d’ailleurs l’instituteur dans les premiers pour être le Conseiller P.L. : celui-ci connaît la législation, les parents qui pourront aider, le garde champêtre, etc. Et puis l’école pourra être dans un premier temps le lieu pour se retrouver, stocker une malle de matériel, jouer à l’abri, avec un minimum de sécurité.

La Patrouille Libre

Comment faire exister une Patrouille Libre ?

Le livre « Foulards verts » insiste sur l’organisation de la Patrouille et son fonctionnement, ses activités et son esprit.

On suppose que beaucoup des PL étaient fondées par un ancien(ne) après déménagement de sa famille. L’attrait du scoutisme, connu partout à cause des camps d’été (3 semaines) qui dispersait les troupes sur le territoire, était très fort : pas de télé, peu de loisirs pour les jeunes et les enfants et tout ce qu’on peut écrire sur « nos années 60 » ! Et la lecture (chaque classe avait sa bibliothèque) faisait rêver. Les indiens, les découvertes des trésors, les mondes héroïques et lointains : on se voyait capable de vivre sur la plus proche île déserte comme Robinson, on envisageait de souffrir mille km de marches à pied sur la piste. Le scout incarne ces rêves : il a son uniforme, ses signes secrets, ses rituels, son feu de bois… On le prend au sérieux dans sa quête, et le monde des adultes reconnaît ses talents, ses mérites, sa valeur : les insignes témoignent, eux qui ont nécessité tellement d’efforts et de préparations !

Donc : le conseil de Patrouille, les missions confiées à chacun(e), l’aménagement du local de Patrouille : un programme passionnant en autonomie. Développement de compétences individuelles et collectives… Tout cela pour être « Toujours prêt à rendre service en toute occasion » : services aux personnes (personnes âgées isolées pour qui il faut aller ramasser du bois mort…) ou service public comme aménagements de sources, de baignade, de pont, de chemins… (Page 28)

La patrouille à ses débuts n’est riche que de grands espoirs et dispose de matériel récupéré ou prêté. Rappel page 24 : « être économe » « prendre soin du bien d’autrui » … et le régisseur de la Patrouille qui est pleinement responsable de l’entretien !

La vie de la patrouille commence par ses traditions, ses règles d’honneur dit-on page 27, et sa « B.A. », sa pratique du « bon tour », de la « Bonne Surprise » du service joyeux, rendu sans tapage, celui qui donne « l’esprit éclaireur » !

On lit page 30 que le programme est préparé par le CP et son second puis discuté et adopté par un vote. Cette pratique démocratique était aussi à l’honneur dans les méthodes actives d’enseignement car les textes libres des écoliers étaient lus avant qu’on choisisse par vote ceux qui seraient imprimés.

On réserve aussi un temps dans le Conseil de Patrouille à la relecture : ce qui n’a pas marché, ce qu’il faudra faire, l’avis de tous, et des avis positifs pour construire « un avenir meilleur » !

Le rythme des activités conseillées est dense : voir page 32 : 2 sorties par mois le Dimanche et dès que tente il y a dans le matériel : week-end ! Camp de Patrouille !

En fin de livre on incite le CP à la connaissance de ses Patrouillards et à la connaissance du Mouvement, afin que la PL soit toujours en lien, par ex avec la Troupe la plus proche ou les responsables de province, avec le conseiller, avec le journal des Éclaireurs et des Éclaireuses. On insiste aussi sur la sécurité et la prudence, sur la préparation des activités, sur la règlementation.

« Toujours prêts en cas d’accident car vous avez appris à l’avance, en patrouille, ce qu’il faut faire dans les diverses circonstances ».

Tout au long du livre c’est la vie en autonomie d’un petit groupe très volontaire qui est privilégiée, un petit groupe d’ « ennemis de la facilité » (page 57). « S’entraîner pour se tirer d’affaires seul en toutes circonstances ».

Alors des PL aujourd’hui hors d’un réseau très structuré, très encadré, avec des HP (hautes patrouilles) très préparées et formées : ce qui a existé pourrait-il se refaire ? Les PL de tous les Mouvements n’ont eu qu’une existence temporaire … mais ô combien exaltante et passionnante !

Un certain nombre ont permis ensuite de créer des unités, des groupes, ont permis à beaucoup de jeunes de vivre un excellent scoutisme, de vivre de si belles aventures…

Notes

[1J’ai donné ou perdu ces 3 livres.

Publié le (mis à jour le )