Les méthodes de gestion de la parole

Pour une discussion fructueuse !

Lors de débats, discussions, conseils, ou même durant la vie quotidienne, faire en sorte que la parole de chacun et chacune ait l’espace d’être entendue, que ce soit celle des chefs et cheftaines, responsables ou des jeunes.

Pour parvenir à gérer la parole, il existe de nombreuses techniques adaptées à différentes situations. La plupart de ces méthodes et conseils peuvent se cumuler selon les besoins du moment.

Trois principes de discussion fructueuse

Lors d’une discussion, avoir conscience de quelques éléments peut permettre de passer d’un capharnaüm à une discussion fructueuse. En voici quelques uns.

1. Étre attentif à la parole de l’autre, ne pas couper la parole

Et oui, ça ne va pas de soi.
Souvent on ne s’en rend pas vraiment compte. Mais en écoutant une discussion attentivement, on peut remarquer dans des groupes de personnes que la discussion se passe par coupage de parole successif.
Le résultat : Personne ne finit ce qu’il a à dire. C’est frustrant, et ça ne laisse pas la place à tous le monde.

Rappeler à tous et avoir une personne qui reste attentive à la parole aide beaucoup.

2. Laisser la place à chacun de s’exprimer

Pour les personnes à l’aise en groupe, c’est facile, quand j’ai envie de m’exprimer, je prends la parole !
Pour d’autres c’est un peu plus compliqué. c’est pour ceux et celles-là qu’il faut être attentif.

On peut agir en faisant prendre conscience à tous du temps de parole qu’ils utilisent. C’est particulièrement intéressant pour les personnes les plus bavardes.
Le but est double pour chacun et chacune :

  • prendre conscience de l’espace qu’il ou elle occupe dans le groupe
  • prendre conscience de l’espace que les autres occupent, ou pas.

Cette prise de conscience est une clé pour la gestion de la parole qui rend tout plus simple ensuite.

On doit également s’assurer que tout le monde est dans un état d’esprit suffisamment sécurisé pour s’exprimer.
Pour cela, il faut faire attention à l’espace pour atteindre la parole (par exemple, suffisamment de temps de silence)

3. Faire preuve de bienveillance et de non-violence

Malheureusement, la bienveillance ne se décrète pas : il ne suffit pas de dire « Soyons bienveillant les uns envers les autres » pour l’être dans les faits.

La bienveillance se construit, peu à peu, au fil du temps, avec la confiance entre les membre d’un groupe. Cependant, il est possible d’agir pour faire émerger un climat plus bienveillant. Tout d’abord, en poussant chacun et chacune à parler au « Je », c’est à dire parler de ce qu’ils / elles ressentent de leur point de vue, en évitant les reproches.
La reformulation est aussi un outil très bon pour créer de la bienveillance et de la compréhension de l’autre : Quand quelqu’un tiens un propos qui peut être perçu comme blessant, ou est effectivement mal vécu, on peut proposer à la personne de réfléchir et reformuler sa pensée sans reproche, au « Je ».
On peut également faire reformuler ou reformuler soi-même. Puis, demander à la personne si cette reformulation correspond bien à sa pensée. On peut répéter cette opération plusieurs jusqu’à ce que la reformulation soit accepté.

Des outils au service de ces principes

Pour appliquer les principes présentés ci-dessus et avoir une discussion fructueuse, nous pouvons utiliser des outils.

Mais en animation, l’outil ne fait pas l’animatrice ni l’animateur : c’est à vous de penser aux outils adaptés à votre animation, pour les mettre au service de celle-ci !

Commençons par les grands classiques.

La main levée pour demander le silence

En quoi c’est bien

  • Augmenter l’écoute

En quoi c’est moins bien

  • Pas vraiment de point négatif

Plus personne ne s’écoute ? des difficultés à commencer une réunion / discussion.

Il suffit d’établir cette règle : quand une personne lève la main, ou réunit ses mains au-dessus de sa tête, tout le monde doit faire de même, et ce faisant, faire silence.

Une méthode utilisée par certain, mais qui probablement moins à même d’amener le calme et parfois plus irritante (mais semble-t-il que c’est le but) et de chanter en boucle « Peut-on commencer la réunion », jusqu’à ce que tout le monde chante, ou se taise.

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Le tour de parole

En quoi c’est bien

  • Régule les prises de paroles
  • Diminue les coupages de parole
  • Laisse l’espace à chacun de s’exprimer

En quoi c’est moins bien

  • Laisse moins la place à la spontanéité
  • Mobilise une personne, qui pourra moins s’exprimer.

Lors d’une discussion, parfois, plusieurs personnes veulent s’exprimer en même temps, provoquant coupage de parole, cacophonie, et celui qui parle le plus vite / plus fort l’emporte.

Une stratégie dans ces situations peut être de désigner un animateur ou une animatrice de la discussion. Son rôle est de tenir un tour de parole en notant dans sa tête ou sur papier l’ordre des participants et participantes qui souhaitent s’exprimer en se signalant discrètement par un signe.

Chaque participant au débat s’exprime alors selon l’ordre donné par l’animateur ou animatrice.

Le bâton de parole

En quoi c’est bien

  • Régule les prises de paroles
  • Diminue les coupages de parole
  • Laisse l’espace à chacun de s’exprimer

En quoi c’est moins bien

  • C’est l’objet qui fait la gestion de parole, pas forcément la volonté des membres du groupe.

Pour éviter le coupage de parole, on peut symboliser la parole par un objet. La personne qui tient l’objet est la seule à pouvoir s’exprimer !

Quand elle a terminé de s’exprimer, elle laisse, donne, ou la personne en charge de la discussion récupère l’objet pour donner la parole au suivant. Pour plus de rythme, quand le groupe est assez grand, on peut faire circuler deux bâtons de parole, le second bâton circulant pendant que le premier parle.

« Dans les cercles de parole bouddhistes, on joint les deux mains paume contre paume pour symboliser qu’on souhaite prendre la parole. Tout le monde répond en joignant également les deux mains.
La parole est rendue quand la personne ayant demandé la parole joint les deux mains de nouveau, et que le reste du groupe la salue de nouveau. »

Le cercle de parole

En quoi c’est bien

  • Les plus timides pourront s’exprimer

En quoi c’est moins bien

  • Pas nécessairement adapté à un débat.

Pour inciter et donner la chance à chacun et chacune de s’exprimer, on peut imposer l’ordre de la parole.

Pour cela, on peut faire tourner un bâton de parole dans le cercle, donnant à tous l’opportunité tour à tour de le prendre.

En laissant l’objet passer tranquillement, les plus timides pourront avoir le temps de dépasser leur timidité ils ou elles le souhaitent, ou passer le bâton aux suivants.

La parole minutée

En quoi c’est bien

  • Limite la parole des plus bavard
  • Pousse à la synthèse

En quoi c’est moins bien

  • Défavorise les personnes qui ont besoin de temps pour formuler leurs pensées

Pour que chacun puisse s’exprimer dans un temps limité, on peut tout simplement chronométrer le temps de parole. Quand une personne a épuisé son temps, elle doit passer la main :)

Le ticket de parole

En quoi c’est bien

  • Limite la parole des plus bavards
  • Laisse un espace inespéré aux plus timides
  • Pousse à la synthèse
  • Pousse à réfléchir avant de parler

En quoi c’est moins bien
 Frustrant quand on ne peut plus s’exprimer.

Le silence est d’or, la parole est d’argent !

Au début du temps de discussion, chacun reçoit un ou plusieurs tickets de parole. Ces tickets peuvent représenter un nombre de minutes, une opportunité de prendre la parole, ou les deux !

Ensuite la règle est simple à chaque prise de parole, ou toutes les X minutes, on doit donner un ticket de parole. Quand on en a plus, on ne peut plus s’exprimer.

Avec les tickets de paroles, il vaut mieux réfléchir avant de parler !

Plein de variantes sont possibles, est-ce possible de céder un ticket de parole à quelqu’un ? Peut-on gagner des tickets supplémentaires ? En mettre en commun ? Faire une prise de parole collective ?

Cercles concentriques

En quoi c’est bien

  • Fait prendre conscience au groupe de la disparité des temps de parole.
  • Pousse à l’écoute, le cercle extérieur étant silencieux
  • Organise la parole

En quoi c’est moins bien

  • il peut être difficile pour une personne timide de parvenir au cercle central
  • Difficile à tenir dans un groupe agité, car créateur de frustration

Dans un grand groupe, on organise les personnes en deux cercles concentriques,

  • Les personnes aux sein du cercle central, dont le nombre est limité à moins d’une dizaine de personne, ont le droit de s’exprimer
  • Le cercle extérieur écoute et observe la discussion, en silence.

Quand quelqu’un souhaite prendre la parole, il prend la place de quelqu’un dans le cercle central. On peut mettre en place avec cette méthode, l’ensemble des méthodes au dessus. Par exemple pour réguler le temps de parole (Parole minutée, tickets).

Laisser le cercle en auto-gestion peut aussi être un outil pour faire prendre conscience au groupe de la disparité de temps de parole, la frustration du cercle extérieur pouvant grandir si les personne du cercle central ne laissent pas leur place. « Y’a que des garçons ici ! », « C’est toujours les même au centre ! »

A venir : les codes gestuels

PS

Cette article est notamment inspirée de la brochure « débat sur les débats » et de méthodes utilisés dans diverses association d’éducation populaires

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